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11 juin 2013

RETRAITES. UN RAPPORT EXPLOSIF.

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La commission d’experts chargée de faire des préconisations pour la future réforme propose un cocktail de mesures qui engendreraient une baisse généralisée des pensions, dans le secteur privé comme dans le public. Un programme dans l’exacte lignée des coups de boutoir portés par les gouvernements de droite.

C’est une potion très amère qu’a concoctée la commission pour l’avenir des retraites, groupe d’experts chargés par le gouvernement de «préparer la concertation et les décisions» pour la future réforme. Alors que de grands médias braquent les projecteurs sur les seules pistes avancées touchant les agents de la fonction publique, en réalité, à bien y regarder, c’est une baisse généralisée du niveau des pensions, dans le secteur privé comme le public, qui se profile si ces préconisations devaient être retenues. «Le rapport est un outil de travail, en aucun cas la préfiguration d’une réforme bouclée», s’est empressée de préciser la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine. Ce qui ne rassure pas vraiment, chacun ayant à l’esprit le précédent du rapport Gallois sur la compétitivité, dont la publication avait été accompagnée de la même précaution verbale, avant que le gouvernement y puise les mesures très libérales de son fameux «pacte de compétitivité». Durée de cotisation, mode de calcul et de revalorisation des pensions, fiscalité: tous les leviers possibles permettant d’imposer l’austérité aux retraités sont convoqués par les experts au nom de la restauration de l’«équilibre financier» du système, tandis que la nécessité d’apporter des ressources nouvelles aux régimes de retraites n’est évoquée que du bout des lèvres, et sous une seule forme, une légère hausse des cotisations patronales et salariales de 0,1 à 0,2 point sur trois ans.

Coup de massue fiscal sur les retraités

Comme le président de la République l’avait pratiquement appelé de ses vœux en prenant pour argument l’allongement de l’espérance de vie, la commission préconise un allongement de la durée de cotisation, au-delà des 41,5 ans déjà prévus par la réforme Fillon. Elle pourrait être portée jusqu’à «43, voire 44 ans», selon l’un des syndicalistes auxquels la présidente de la commission, Yannick Moreau, a présenté lundi les grandes lignes du rapport. Une mesure qui n’amènerait pas forcément les salariés à travailler plus longtemps, étant donné la situation de l’emploi et la crise du travail qui les conduit, en général, à vouloir «décrocher» le plus vite possible, mais qui aurait sûrement pour effet, pour les nouvelles générations, de faire baisser les pensions, fait remarquer un spécialiste.

La commission Moreau préconise ensuite une sorte de coup de massue fiscal sur les retraités. D’abord en alignant le taux réduit de CSG appliqué actuellement aux retraités imposables (6,6%) sur celui des actifs, soit 7,5%. Ensuite en supprimant l’abattement de 10% dont bénéficient tous les retraités, ce qui aurait pour effet, soit d’en rendre certains imposables, soit d’en amener d’autres à une tranche supérieure d’imposition. Autre mesure fiscale suggérée: soumettre à l’impôt la majoration de 10% des pensions accordée aux parents de trois enfants ou plus.

Troisième grand volet de ce cocktail infernal: des dispositions modifiant le mode de calcul et la revalorisation des pensions. Comme on le redoutait, sur le modèle de ce que le Medef a imposé dans les régimes complémentaires Arrco-Agirc – et qui a été vanté par le gouvernement Ayrault comme un exemple de prise de responsabilité –, la commission Moreau propose de ne plus indexer les pensions sur l’inflation, entre 2014 et 2016, mais de les revaloriser à un niveau inférieur aux prix. Soit une perte de pouvoir d’achat net assurée. Ce n’est pas tout. Plus inattendu: elle suggère de désindexer aussi les «salaires portés au compte», c’est-à-dire l’ensemble des salaires entrant dans le calcul de la retraite. Leur montant serait donc ainsi réduit, et, par contrecoup, la pension aussi. Plus grave encore: selon la commission, cette sous-indexation des salaires portés au compte pourrait être érigée en instrument permanent pour piloter le budget des régimes de retraites. Ainsi, en cas de crise économique, le gouvernement pourrait décider de les revaloriser plus ou moins au-dessous de l’inflation, voire de les «geler». On avance ainsi, fait observer un spécialiste, vers un changement fondamental de principe: d’un système «à prestations définies», qui garantit un niveau de pension et use des cotisations comme variable d’éventuel ajustement, à un système «à cotisations définies», où les pensions servent de variable d’ajustement. Ce dernier modèle, mis en œuvre dans les régimes par capitalisation, étant le préféré du patronat.

Les fonctionnaires également visés

Les fonctionnaires, de leur côté, sont aussi menacés d’une forte compression de leur niveau de retraite, avec la proposition de modifier le calcul de leur pension en prenant pour base les salaires des dix dernières années de la carrière, au lieu des six derniers mois. Une partie des primes (qui peuvent représenter une grande partie de leurs traitements, et n’entrent pas actuellement dans le calcul) serait prise en compte.

 

Le dernier chapitre du rapport Moreau, sur la pénibilité, n’offre pas de réelle compensation, et apporte même des motifs d’indignation. Toutes ces mesures ne se cumuleraient pas, indique un syndicaliste, le gouvernement aurait à choisir dans cette «boîte à outils». Une boîte, on le voit, très unilatéralement orientée. De quoi conforter, à la fois, la très vive inquiétude et la forte disponibilité à la mobilisation sociale exprimée par les Français dans un récent sondage CSA-L’Humanité .

07:54 Écrit par poutargue dans National | Commentaires (0) | Lien permanent |  Facebook |

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