04 novembre 2012
LA METROPOLE MARSEILLAISE : ACTE III DE LA RECENTRALISATION ?
Depuis la venue en septembre du premier ministre Jean Marc Ayrault, nombre de ministres se sont succédés à Marseille afin de « vendre » le produit Métropole, nouvel élixir de jouvence pour Marseille et bien sûr son territoire métropolitain. Retour en arrière, pourquoi cette venue et ce diagnostic ?
Bien entendu, pour mettre fin à une série de meurtres ou règlement de comptes qui affecterait Marseille, victime de tous les maux du grand banditisme.
Depuis l’actualité a démontré le revers de la médaille. Ce sont les « ripoux » de la police de la « bac des quartiers Nord » qui ont été arrêtés, pas les assassins. En Corse, c’est un énième règlement de comptes, sans pour autant que l’on brandisse là-bas, la solution miracle Métropole. Il y a deux jours, deux nouveaux assassinats viennent d’être commis en pleine rue des quartiers… Nord, pendant l’installation des renforts de police !
Exit donc le motif initial qui avec le temps sera vite oublié.
Par contre, le ballet frénétique se poursuit sous la houlette de la ministre Marylise Lebranchu, qui multiplie les rencontres. Jusqu’au président de la République lui-même qui vient en personne, confirmer que « le nouvel acte de la décentralisation inclura le fait métropolitain. »
C’est ce qu’a retenu Eugène Caselli, président de Marseille Provence Métropole, reçu à cette occasion à l’Elysée avec 25 maires et présidents d’agglomération phares ce mardi 30 octobre, favorable lui à la Métropole.
La veille, le 29 octobre, la ministre Lebranchu a rencontré de nombreux maires et élu-e-s de notre département en préfecture à Marseille. L’ADECR, qui est l’association des élu-e-s communistes et républicains, avait appelé à venir manifester l’opposition à cette Métropole « imposée à marche forcée ». J’étais donc présent à ce rassemblement écourté par la ministre qui, pour une fois n’est pas coutume à Marseille, à ouvert les portes de la préfecture à tous. Se voulant rassurante envers les élu-e-s présents, elle indiquait rechercher un consensus, indiquant « que la loi de 2010 serait abrogée, que les communes ne disparaîtraient pas, que les compétences des maires ne seraient pas impactées, etc.… » Elle annonce un calendrier serré. D’ici fin décembre, la concertation doit se conclure par une loi présentée au parlement au printemps 2013. Georges Rosso, maire communiste du Rove, prenait la parole et lui remettait 72 signatures des maires opposés à la mise en place de cette Métropole, ainsi que la lettre commune des présidents d’agglomération de notre département (sauf celui de MPM). Le message fut clair, chaleureusement applaudi par la quasi-totalité des élu-e-s présents de toutes tendances, ce que ne pouvait que constater la ministre. Il n’en fut pas de même selon les intervenants favorables à la Métropole.
Imaginer une entité à 90 communes avec la Métropole, alors qu’actuellement 18 communes constituent la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, déjà pas simple, même si celles-ci conserveraient leur PLU (plan local d’urbanisme) ne rassure en rien les maires, même si on leur promet une réunion mensuelle. La question est pourquoi faire une nouvelle structure d’une telle taille ? Dans quel but, éloigner encore le centre de décisions des communes, donc de la proximité des populations ?
Officiellement il s’agit de « sauver Marseille, ville pauvre, qui croule sur les charges de centralité et ne retire aucun subside par exemple de Plan De Campagne avec sa zone commerciale où les marseillais viennent consommer », selon les propos du maire Jean Claude Gaudin, qui lui ne souhaiterait pas une Métropole si vaste. Or selon le schéma établi PLM (Paris, Lyon, Marseille), ces mégapoles en fait, seraient organisées (avec sans doute une particularité marseillaise), pour « être en compétition » avec les grandes métropoles européennes notamment comme Gênes ou Barcelone. Lorsque que l’on voit à quel prix elles se sont bâties, dans ces pays dont les populations sont étranglées par le diktat de la troïka européenne, on comprend vite que les peuples, et en bout de ligne, nos concitoyens gignacaises et gignacais, n’ont rien à y gagner.
A contrario, un véritable aménagement des territoires doit raisonner en premier lieu en termes de coopérations, en France et en Europe, en matière de transports, de logements, de services publics adéquats… Pas en terme de concurrence entre les entreprises et les salariés réduits au stade de salariés « kleenex », jetables à souhaits pour les profits des actionnaires. On comprend pourquoi le patronat marseillais, le MEDEF, revendique l’urgence de la Métropole. In fine, sous couvert de décentralisation, on recentralise. Si on en doutait, regardons ce qui se passe en termes de réorganisations dans les services publics tels France Télécom, la Poste, les finances, l’hôpital… Où on éloigne de plus en plus les services des populations, avec des répercussions graves comme malheureusement le drame de la maternité trop éloignée, ou le nouveau suicide à la Poste, viennent de nous le rappeler dernièrement. Il y a urgence au-delà des élu-e-s à ce que les populations s’en mêlent. Retirer peu à peu l’autonomie communale, c’est éloigner le centre des décisions des citoyens, la proximité de leurs élu-e-s.
Ensemble construisons en harmonie avec les populations, des coopérations nouvelles qui permettront le mieux vivre dans nos territoires qui ont droit à une égalité de traitement envers les citoyens, synonyme d’égalité dans le cadre de la République, et non de compétitions inter-territoires.
Alain CROCE
Conseiller municipal de Gignac La Nerthe,
Conseiller communautaire Marseille Provence Métropole
P.S. Ce samedi l’émission sur France 3, « la voix est libre » a donné la parole à Eugène Caselli, partisan de la Métropole et à Maryse Joissains, maire UMP d’Aix, présidente de l’agglo du Pays d’Aix, opposée à la Métropole. Norbert Nourian, directeur des études à Science po à Aix, partisan lui aussi de la Métropole, on l’aura compris dans ses propos, venait compléter ce débat. Il est dommage que parmi les opposants au projet, ni les maires ou présidents d’agglomération du P.S, du PCF ou d’autres, n’aient pas été invités. La « voix ne serait-elle pas libre » sur France 3 ?
09:54 Écrit par poutargue dans National | Commentaires (0) | Lien permanent | Facebook |
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